Au-delà des cépages et méthodes de vinification, une des clés de compréhension du succès vitivinicole de la Bourgogne est à chercher du côté de son système unique de classification.
Dans cet article, nous vous proposons donc d'aborder la pyramide qualitative des vins et terroirs bourguignons. De la notion de « climat » à celle de « Grand Cru », plongez avec nous dans l'univers fascinant des vins de Bourgogne !
Sommaire
Définition de la notion de Climat en Bourgogne
Bernard Pivot, grand amateur de vin à dit un jour : « En Bourgogne, quand on parle d'un Climat, on ne lève pas les yeux au ciel, on les baisse sur la terre ». Cette phrase résume à elle seule le classement des vins de Bourgogne.
En effet, ici, le concept de "terroir" n'est pas juste un mot à la mode : il fait partie de l'ADN même de la région. Chaque parcelle de vignes possède sa propre identité grâce à ses sols, son orientation, son microclimat etc., tant d'éléments qui se combinent pour offrir des vins uniques, aux nuances infinies.
Mais revenons donc à la notion de « climat ». En Bourgogne, ce mot n'est donc pas relié à la météorologie mais est un terme technique désignant une parcelle de vignes , précisément délimitée par l'homme à travers les siècles, étant reconnue pour ses caractéristiques spécifiques, qu'elles soient géologiques, hydrométriques. ou reliés à l'exposition. Chaque « climat » est donc un univers viticole à part entière .
Les nuances d'identité de chaque parcelle se retrouvent donc dans chaque bouteille de vin, ce qui explique pourquoi un même cépage (le Pinot noir ou le Chardonnay) peut avoir des saveurs si variées d'un climat à l'autre.
Origines et histoire du classement en Bourgogne
Mais alors, comment ces climats sont-ils devenus si emblématiques ? Si la viticulture en Bourgogne remonte à l'époque gallo-romaine, c'est au Moyen Âge que l'on observe les premières distinctions de parcelles. Les moines bénédictins et cisterciens, notamment des abbayes de Cluny et de Cîteaux, jouent alors un rôle clé dans l'organisation et l'amélioration des vignobles.
Ces ordres religieux adoptent une approche scientifique et spirituelle du vin , observant les différences de qualité selon les sols, l'exposition au soleil et les microclimats. Ils commencent alors à diviser les vignobles en fonction de ces caractéristiques naturelles.
Le terme « climat » n'apparaîtra néanmoins essentiellement dans les écrits qu'à partir du XVIe siècle . À cette époque, la Bourgogne est déjà célèbre pour la finesse de ses vins, et la segmentation des terres reflète une volonté de mettre en valeur la diversité des terroirs.
Au XVIIIe siècle , la cartographie des vignobles se développe , et les "climats" deviennent des repères pour les marchands et les consommateurs. Les vins commencent à être identifiés non seulement par leur région, mais par leur lieu précis de production.
Au XIXe siècle , le travail des géologues et agronomes, comme Jules Lavalle (avec son ouvrage de 1855 "Histoire et statistique de la vigne et des grands vins de la Côte-d'Or" ), contribue à classifier les vignobles selon leur qualité. Ces études renforcent la notion de « climat » comme un élément clé de la hiérarchie des vins de Bourgogne.
La reconnaissance officielle de ce travail séculaire fait sur ces terroirs s'est accélérée en 1936 avec la création du système d'AOC ( Appellations d'Origine Contrôlée ). Chaque climat devient alors relié à une (parfois deux) appellation précise.
En 2015, les « climats » de Bourgogne sont inscrits au patrimoine mondial de l'UNESCO , une consécration pour ce modèle unique de viticulture. L'inscription met en avant la précision et l'intimité du lien entre chaque vin et son lieu d'origine, fruit de plusieurs siècles d'observation et de travail.
Aujourd'hui, la notion de « climat » en Bourgogne va bien au-delà de la géographie ou de l'agronomie. Elle représente un équilibre entre l'homme et la nature , une quête d'excellence qui repose sur une compréhension fine des sols, des cépages et des conditions locales. Avec environ 1 247 climats répertoriés dans la région, chaque parcelle porte une identité unique qui se reflète dans le verre.
Cette histoire témoigne de l'engagement des Bourguignons à préserver et transmettre ce patrimoine exceptionnel à travers les générations.
Carte des vins de Bourgogne
Les quatre niveaux d'appellations en Bourgogne
Maintenant que nous avons défini cette notion de « Climat » importante à la compréhension générale, parlons désormais de la hiérarchisation de ces derniers et de la pyramide de 4 niveaux qu'il existe dans la région concernant les vins locaux.
Les appellations régionales (52 % de la production)
En Bourgogne, les appellations régionales constituent le premier niveau de la hiérarchie des appellations d'origine contrôlée (AOC). Elles représentent environ 52% de la production totale de vins .
Si la mention simple « Bourgogne » est la plus importante, il existe néanmoins d'autres appellations régionales comme « Bourgogne Côte d'Or » pour les vins produits exclusivement dans la Côte de Nuits et la Côte de Beaune, ou encore « Bourgogne Aligoté » pour les cuvées produites à partir du cépage. « Crémant de Bourgogne » et « Coteaux Bourguignons » font également partie de ce niveau de classification.
Tous ces vins sont souvent considérés comme la porte d'entrée idéale pour découvrir la région . Ils sont accessibles, parfaits pour les amateurs de vin qui souhaitent goûter à la diversité de la Bourgogne sans investir prioritairement dans des bouteilles trop coûteuses. Un véritable tremplin donc pour ceux qui souhaitent se familiariser avec la richesse et la finesse des vins de Bourgogne !
Les appellations villages (36 % de la production)
Puis, au-dessus des AOC régionales, viennent les « appellations villages ». Ces dernières font le lien entre les vins et les villages qui les produisent. Ainsi, Chablis, Nuits-Saint-Georges, Meursault, Pommard, Puligny-Montrachet ou encore Givry sont toutes des appellations villages.
Il est par ailleurs possible pour un vigneron de préciser un climat spécifique du village si son vin provient exclusivement de cette parcelle. Vous pouvez donc par exemple croiser un Gevrey-Chambertin « Au Vellé » ou encore un Chassagne-Montrachet « En Pimont ». La notion de terroir devient alors encore plus poussée et spécifique.
Les vins des appellations villages sont souvent plus complexes et identitaires que ceux en AOC régionales car réalisés sur des terroirs bien plus restrictifs en termes de superficie.
Les Premiers Crus (10 % de la production)
La Bourgogne compte près de 640 climats classés « Premier Cru » , ces derniers représentant le top 10% de la production régionale .
La mention « Premier Cru » est attribuée à des parcelles pour leurs caractéristiques exceptionnelles , que cela soit en termes de sols ou d'exposition. Celle-ci est donc un véritable gage de qualité et ces terroirs se situent au-dessus des appellations villages dans la hiérarchie.
Ces derniers offrent des vins très divers dans leur expression mais souvent plus complexes et intenses . Les potentiels de garde , que cela soit pour les vins blancs à base de Chardonnay ou les vins rouges à base de Pinot noir, sont également plus importants.
Certains noms vous disent peut-être quelque chose comme « Les Amoureuses » à Chambolle-Musigny, le 1 er Cru « Clos des Mouches » en AOC Beaune ou encore « Les Rugiens » sur Pommard ?
Les Grands Crus (moins de 2 % de la production)
La Bourgogne compte précisément 33 Grands Crus qui représentent le sommet de la hiérarchie des vins bourguignons. Ces climats d'élite couvrent une surface totale d'environ 2% de l'ensemble du vignoble, soit seulement 550 hectares .
La grande majorité des Grands Crus se situent en Côte de Nuits (24) -essentiellement des vins rouges-, tandis que 8 sont présents en Côte de Beaune -essentiellement des vins blancs-. Chablis possède également 1 Grand Cru bien que plusieurs climats y soient définis.
Les vins issus de ces parcelles emblématiques figurent parmi les meilleurs du monde et leurs prix peuvent atteindre des sommets, et, bien souvent, leur qualité est absolument exceptionnelle .
Pourquoi ces vins sont-ils si chers ? Tout d'abord, la production est extrêmement limitée . Un Grand Cru, c'est souvent seulement quelques ares pour un vigneron (1 are = 100m²), une surface toute petite à l'échelle d'un vignoble et qui ne permet de produire que peu de bouteilles. Ensuite, la demande mondiale est très élevée , les amateurs (et spéculateurs) s'arrachent le peu de vins disponibles.
Enfin, il y a le prix du foncier : les terres qui produisent ces Grands Crus sont parmi les plus chères au monde. Le prix peut en effet osciller entre 3 millions d'euros et 15 millions d'euros l'hectare , selon la localisation et le climat en question !
Néanmoins, malgré des prix très élevés, les Grands Crus offrent une expérience gustative hors du commun , une profondeur de saveurs, une complexité et une longévité qui peut justifier leur prix (pas tout le temps).
Les 33 Grands Crus de Bourgogne
Voici la liste des 33 Grands Crus de Bourgogne. Commençons avec les 24 Grands Crus de la Côte de Nuits, essentiellement renommés pour leurs sublimes Pinots noirs.
- Chambertin (Gevrey-Chambertin)
- Chambertin-Clos de Bèze (Gevrey-Chambertin)
- Chapelle-Chambertin (Gevrey-Chambertin)
- Charmes-Chambertin (Gevrey-Chambertin)
- Griotte Chambertin (Gevrey Chambertin)
- Latricières-Chambertin (Gevrey-Chambertin)
- Mazis-Chambertin (Gevrey-Chambertin)
- Mazoyères-Chambertin (Gevrey-Chambertin)
- Ruchottes-Chambertin (Gevrey-Chambertin)
- Clos de Vougeot (Vougeot)
- Musigny (Chambolle-Musigny)
- Bonnes-Marès (Chambolle-Musigny / Morey-Saint-Denis)
- Clos de la Roche (Morey-Saint-Denis)
- Clos Saint-Denis (Morey-Saint-Denis)
- Clos des Lambrays (Morey-Saint-Denis, quasi-monopole du Domaine des Lambrays)
- Clos de Tart (Morey-Saint-Denis, monopole Domaine du Clos de Tart)
- Richebourg (Vosne-Romanée)
- La Romanée (Vosne-Romanée, monopole du Domaine du Comte Liger-Belair)
- Romanée-Conti (Vosne-Romanée, monopole du Domaine de la Romanée-Conti)
- Romanée-Saint-Vivant (Vosne-Romanée)
- La Grande Rue (Vosne-Romanée, monopole du Domaine François Lamarche)
- Échezeaux (Vosne-Romanée)
- Grands-Échezeaux (Vosne-Romanée)
- La Tâche (Vosne-Romanée, monopole du Domaine de la Romanée-Conti)
Puis viennent les 8 Grands Crus de la Côte de Beaune, essentiellement réputés pour leurs grands vins blancs.
- Corton (Aloxe-Corton, Pernand-Vergelesses, Ladoix-Serrigny, décliné en 10 climats)
- Charlemagne (Aloxe-Corton, Pernand-Vergelesses, Ladoix-Serrigny)
- Corton-Charlemagne (Aloxe-Corton, Pernand-Vergelesses, Ladoix-Serrigny)
- Montrachet (Puligny-Montrachet et Chassagne-Montrachet)
- Chevalier-Montrachet (Puligny-Montrachet)
- Bâtard-Montrachet (Puligny-Montrachet et Chassagne-Montrachet)
- Bienvenues-Bâtard-Montrachet (Puligny-Montrachet)
- Criots-Bâtard-Montrachet (Chassagne-Montrachet)
Enfin, en dehors de ces deux zones, Chablis Grand Cru est souvent ajouté à la liste, mais ce dernier est géographiquement séparé, dans le nord de la Bourgogne. Ce Grand Cru possède par ailleurs 7 climats distincts pouvant compléter sa mention : Blanchot, Bougros, Les Clos, Grenouilles, Preuses, Valmur et Vaudésir.
Carte de l'appellation Gevrey-Chambertin
Voilà, vous savez désormais tout sur le classement des vins de Bourgogne ainsi que sur les notions de « climat », « Premier Cru » et « Grand Cru » ! Comme vous l'aurez compris, la classification bourguignonne est un guide précieux pour explorer les trésors régionaux et se repérer parmi les nombreuses appellations et sous-régions.
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