Chaque premier week-end de février, près de 30 000 visiteurs convergent vers le Jura. Quel grand évènement déplace les foules à ce point ? La Percée du vin jaune bien entendu ! Célébrée chaque année à tour de rôle dans un des villages producteurs de la région, la cérémonie fête la « mise en perce » (ouverture faite à un tonneau pour en tirer le vin) après six ans et trois mois d’élevage, soit le temps minimum requis pour pouvoir mettre en vente le célèbre vin.
La cérémonie est l’occasion pour le public de déguster vins jaunes et vins du Jura dans de nombreux caveaux où s'installent l'essentiel des producteurs pour l'occasion.
Mais comment en est-on arrivé à célébrer le vin jaune ? Quelle est son histoire ? Où et comment est-il fabriqué ? Quel goût a-t-il ? Vous trouverez toutes les réponses à ces questions grâce à cette lecture de moins de 5 minutes.
Histoire du Vin Jaune
L'histoire du vin jaune commence par une légende : elle raconte qu'un vigneron ayant abandonné un fût au fond de sa cave aurait été très agréablement surpris, bien des années après, par la délicieuse saveur du nectar obtenu. Ce serait donc le fruit du hasard qui donna naissance au vin jaune ? Si l’histoire est plaisante, elle est probablement trop belle pour être vraie.
Malheureusement, à date, très peu d’éléments sont accessibles pour confirmer l’origine précise de ce vin. En effet, si la première trace écrite documentant le vin jaune remonte seulement à 1822, nous savons néanmoins que son existence est plus lointaine car la plus ancienne bouteille de vin jaune retrouvée date quant à elle de 1774. Certaines suppositions font même remonter ses origines au XIIIème siècle !
Enfin, la fameuse « Percée du vin jaune » ne fut créée quant à elle qu’en 1996 par le vigneron Bernard Badoz afin d’honorer la subtilité et la complexité de ce précieux nectar doré. Si sa volonté première était de créer une véritable soirée de découverte et de dégustation, il faut avouer que l’évènement a depuis perdu de sa superbe et vire le plus souvent à la saoulerie (au même titre que les festivités organisés pour le Beaujolais nouveau).
Plus vieille bouteille de vin jaune adjugée 103 700€ aux enchères en 2018
Fabrication & vinification
Si l’histoire de ce vin reste globalement assez mystérieuse, il est néanmoins plus aisé de comprendre ses fabrication et vinification. Tout d’abord, le vin jaune vient (comme avez dû le comprendre) du Jura, petite région viticole s’étendant sur 80 kilomètres, et peut être produit au sein de 4 AOC : Côtes du Jura, Étoile, Arbois ainsi que Château-Chalon dont les 50 hectares se consacrent uniquement à sa fabrication.
Par ailleurs, c’est un vin produit à partir d’un seul et unique cépage local : le savagnin. Si ce raisin peut tout à fait être vinifié de manière « classique » afin d’en faire un vin fruité et salin, un profil tout à fait différent d’arômes émanera lors de son élaboration en vin jaune.
Pour porter la dénomination « vin jaune », le savagnin devra être élevé en fûts de chêne durant minimum 6 ans et trois mois sans ouillage. L’ouillage est une méthode consistant à remplir un fût au fur et à mesure de l’évaporation du vin contenu dans la barrique (la fameuse « part des anges ») par un même vin d’une qualité similaire. Ce procédé permet de protéger le vin en cours d’élevage de l’oxydation (le vin étant en contact avec plus d’oxygène dans la barrique si celle-ci n’est pas totalement remplie).
Ici, grâce à ce non ouillage, un voile de levure va se former à la surface du liquide dans le fût, protégeant ainsi le vin d'un excès d’oxygène. C'est cet atypique et long élevage en barriques qui donnera ce fameux goût de « jaune » au vin avec des arômes complexes et uniques.
Une fois la vinification terminée, notre nectar sera mis en bouteille dans un format spécifique : le clavelin, un beau flacon à l’apparence « old school » de 62 cl. Pourquoi cette contenance ? Tout simplement car après évaporation durant ce long élevage (cf. « part des anges »), il resterait théoriquement 62 cl de vin pour chaque litre vinifié au départ.
Voile de levure se développant dans un fût non ouillé
Un vin au goût unique
Attention à la première gorgée de vin jaune ! C’est un nectar surprenant et clivant dont les amateurs raffolent mais pouvant être très déroutant pour les néophytes. Sans sucre résiduel (sec), des arômes puissants émanent au nez et se confirment en bouche : c’est un breuvage capiteux et intense dont les marqueurs habituels sont la pomme verte, la muscade, la cannelle mais surtout les fruits secs (noix, amande) et le curry.
Il est d'ailleurs préférable de procéder à une ouverture anticipée ou un service en carafe pour profiter pleinement d'une bouteille. De plus, veillez à ne pas consommer le vin jaune trop froid ! La température idéale de service se situant entre 14° et 16°C (comme un rouge léger).
Se suffisant à lui-même en dégustation, le vin jaune est à mes yeux particulièrement intéressant à table où il fera un magnifique partenaire. Se combinant très bien avec des plats épicés asiatiques, rien ne le sublimera néanmoins mieux que les accords classiques l’associant avec un comté affiné de 12 mois ou encore avec un poulet aux morilles : sublime !
À retenir
Le vin jaune est un vin blanc issu du cépage savagnin élevé durant minimum 6 ans et 3 mois en fûts sous un voile de levures qui lui donnera toute sa complexité aromatique (pomme verte, noix, curry etc.). Il est embouteillé dans une bouteille de 62 cl appelée « clavelin ». D’une grande intensité, c’est un breuvage d’une incroyable garde étant capable de se bonifier en cave durant plusieurs décennies (voire plusieurs siècles).
Vous l’aurez compris, vous vous devez de goûter à ce vin unique au moins une fois dans votre vie ! Pour se faire, La Cave Éclairée vous propose le vin jaune du Domaine Jérôme Arnoux : une superbe bouteille d’une grande complexité représentant à merveille ce que doit être un bon vin jaune.
Santé !
4 commentaires
Vin de Jura, long en bouche, un élixir pour le palais, lorsque l’on y a gouté nous voulons en avoir en réserve.
Bonjour Hervé,
d’autres cépages permettent également la production de “vins de voile” (Vin Jaune étant une sémantique réservée au Jura) et le savagnin n’est donc pas le seul élu. Pour exemple, le domaine Plageoles dans le Sud-Ouest à Gaillac réalise un vin de voile à partir du cépage Mauzac. En Espagne, et bien que le procédé de fabrication ne soit pas exactement similaire, la région d’Andalousie propose de nombreux vins de voile (Xérès) réalisés avec le cépage Palomino.
Le Jura n’a donc pas de particularité de terroir pour permettre le développement de certaines levures, ce sont simplement le contrôle des températures dans les chais ainsi que le suivi précis du vieillissement des vins qui permettront de réaliser un vin jaune ou un vin de voile.
En espérant avoir répondu à votre question !
À bientôt,
Maxime, La Cave Éclairée
Pourquoi est ce seulement le savagnin du jura qui puisse permettre cet elevage sous voile ?
Est ce que ce vignoble a des particularités dans le developpement de ce type de levure ?
Merci de votre réponse
Très intéressant merci pour cet article !